[mis à jour en avril 2025]
Bruno Massé est géographe, écologiste et spécialiste du mouvement environnemental. En tant qu’écrivain, il s’intéresse à la révolte et aux créatures de la nuit.
Une bio trop longue? Let’s go.
La confusion multidisciplinaire
Mettons quelque chose au clair: plusieurs vocations m’ont amené sur l’espace public : recherche, littérature, activisme, activités professionnelles, et cela crée parfois de la confusion. J’ai un parcours atypique.
Cette vitrine Web vise surtout à exposer mes projets artistiques et mes recherches académiques.
Suspense!
Mon parcours
Je suis né en 1982 dans un petit village des Laurentides, dans une famille modeste. Ce coin touristique m’a prédestiné à la révolte et à la poésie, le choc avec la réalité et l’envie de la transformer. J’ai depuis fait mon chemin d’une marre à l’autre pour m’échouer sur les plages contaminées de Laval, puis Québec, Montréal et Gatineau.
Devenu technologue forestier pour fuir la ville, j’ai ensuite poursuivi bacc et maîtrise en géographie [sociale] où mon mémoire, l’Écologie radicale au Québec, fut reconnu comme un ouvrage de référence. Après dix ans d’activisme en environnement, je suis devenu coordonnateur général du Réseau québécois des groupes écologistes (2010-2016) pour défendre et représenter les quelque 80 groupes écologistes autonomes du Québec. À ce titre, j’ai occupé la présidence du Réseau québécois de l’action communautaire autonome (2013-2015) pour représenter les quelque 60 autres regroupements d’organismes, donc environ 4 000 groupes communautaires et 11 000 travailleurs et travailleuses.
Pendant ce temps, je suis resté un chercheur sur les mouvements sociaux en publiant de nouveaux articles dans Nous sommes ingouvernables (Lux) et Angles Morts, différents regards sur le zombie (XYZ), puis un article dans le Dictionnaire de la pensée écologique (PUF). J’ai également coordonné le projet 30 ans au RQGE(2012), menant au livre de Philippe Saint-Hilaire qui offre une des meilleures contributions à la compréhension du mouvement environnemental québécois. Enfin, avec Philippe et Jacinthe Leblanc, nous avons produit le Portrait des groupes écologistes communautaires (2017), une nouvelle œuvre de référence sur le mouvement environnemental québécois. Toutes mes recherches sont finalement résumées dans mon essai La lutte pour le territoire québécois: entre extractivisme et écocitoyenneté (2020).
En parallèle, j’ai complété ma scolarité avec un diplôme de 2e cycle en pédagogie postsecondaire, puis un diplôme de 2e cycle en administration publique à l’ENAP. Entre 2014-2018, j’ai été enseignant de géographie et de méthodologie en sciences humaines aux cégeps Marie-Victorin et Édouard-Montpetit.
Après avoir déménagé en Outaouais, j’ai travaillé comme consultant en analyse territoriale pour le Conseil de la Nation Atikamekw, puis agent de recherche à l’Université du Québec en Outaouais.
Les romans
J’ai passé les dix premières années de mon parcours d’écrivain dans l’underground: des années de caféine, de tourmente et de joie subversive. L’Aube noire (2005), rédigé en Irlande, était inspiré des événements du Sommet des Amériques de Québec. Publié avec le collectif artistique La Forêt noire et réédité deux fois depuis, c’était un premier départ incendiaire. The Noxious and the Daemon Flower (2007) fut un premier roman anglais, une expérience cryptique de fiction nihiliste témoignant des difficultés liées à la précarité, la révolte sociale et la répression politique. Necropolis (2012) se voulait le premier d’une trilogie postapocalyptique gothique (The Malice Cycle). Après trois ans de travail, j’ai décidé de mettre mon volet anglophone en hiatus, non sans avoir terminé Necropolis et l’avoir publié en license creative commons.
La série des Carpates (2012-2014) marque un bref détour dans la littérature érotique, d’abord avec Valacchia (2012, Guy Saint-Jean), un tirage ambitieux et un rayonnement dans la francophonie. J’ai tenté de contribuer au genre de la littérature érotique par des codes pro-féministes, non hétéronormatifs, essayant de créer, par la positive et la légèreté, un hommage aux classiques de l’horreur. Le Jardin des rêves (2013, Guy Saint-Jean) succède et quoiqu’apprécié par la critique, l’éditeur se recentre et choisit de ne pas poursuivre. Une nouvelle et un manuscrit étaient pourtant complétés, et plutôt que les abandonner, j’ai choisi de publier moi-même la nouvelle Strigoiaca (2014) et Le cirque diabolique (2014) (avec l’aide de Sabotart) afin de conclure la série et ce chapitre de ma vie littéraire.
M9A. Il ne reste plus que les monstres (2015, Sabotart) constitue un retour à une fiction révoltée. Le roman cyberpunk trace un paysage cauchemardesque d’un Québec des années 2050 en explorant les conséquences du changement climatique, de l’extractivisme, de la répression politique et des inégalités sociales extrêmes. Malgré les moyens limités d’un éditeur engagé et autonome, le roman chemine dans le réseau des librairies indépendantes et reçoit une nomination au prix Jacques-Brossard de la science-fiction et du fantastique, dévoilée au Congrès Boréal 2016.
Un nouveau chapitre s’annonce avec l’éditeur Québec Amérique. Creuse ton trou (2017) est un roman d’anticipation où se croisent la nordicité, le lobbyisme et l’extractivisme minier. Un lobbyiste brisé arrive dans un village également brisé pour retrouver un prospecteur disparu. À mi-chemin entre Twin Peaks et Trou Story, l’étrangeté du 50e parallèle au rythme de l’effondrement de la civilisation industrielle. À mon agréable surprise, des critiques favorables ont paru dans le Journal de Montréal, le Devoir, Radio-Canada et TVA.
Si Creuse son trou est connu pour son humour, j’ai eu envie de pousser le style à son comble pour le prochain morceau de pavé. Dans Buzzkill (Québec Amérique, automne 2019) on assiste à l’effondrement de la civilisation industrielle du point de vue des spectateurs passifs, des hipsters qui sirotent leurs drinks et textent pendant que tout s’écroule. Variation sur un seul thème exaspéré par une spirale vertigineuse vers le fond, Buzzkill est une drôle de créature : à la fois comédie d’horreur, réflexion sur l’hyperréalité et les médiations technologiques, regard sur la fuite dans notre société et enfin, quelque part entre les lignes, une lettre d’amour codée à ceux et celles qui se battent pour l’environnement et la justice sociale. Un peu de glam avant le dernier bang.
En mars 2020 (en pleine pandémie!) paraît mon premier essai longue-forme, La lutte pour le territoire québécois. M’inspirant de mon expérience de militant et mes recherches sur le mouvement environnemental, La lutte se traduit par un procès de l’extractivisme québécois, un portrait inédit du mouvement environnemental, une critique du développement durable et un plaidoyer pour une transition économique et écologique. Cela fait des années que j’accumule les données, les éléments de réflexion critique et les anecdotes et j’ai enfin eu le temps de coucher ces travaux dans un format accessible, avec la rigueur (presque) d’un travail académique mais sans la lourdeur, avec le ton humoristique de mes romans, bref, c’est comme si on prenait un café ensemble.
En 2021, après une période de jachère, je me suis lancé dans mon projet le plus ambitieux à date: la série de dark fantasy Aporia. L’idée d’une série espérant s’échelonner sur plusieurs titres semblait la meilleure façon d’explorer un territoire imaginaire en profondeur, construire des trames puissantes, bref, faire vivre le monde. J’ai eu la chance de collaborer avec Fides et sa merveilleuse équipe.
Après presque trois ans de travail, le premier tome, L’Anse-aux-Malices, est paru en 2024.
Le deuxième tome, L’espace noir entre les étoiles, sera publié le 15 mai 2025.
…
Mais tout cela représente bien mal la réalité, comme si j’avais été seul tout ce temps-là, comme s’il n’y avait personne pour relire, personne pour illustrer, corriger, épauler, discuter! Mes romans sont toujours issus d’une vie (artistique, intellectuelle, sociale) collective, par exemple au Bloc des auteurs-es anarchistes où nous avons organisé plus de 20 cabarets micro-ouverts à travers le Québec, au Festival international de théâtre anarchiste de Montréal où j’ai monté six pièces, puis au festival de théâtre anarchiste expérimental les Entractes. J’ai eu le plaisir de travailler avec des dizaines de collègues à la correction, l’édition, la direction artistique, l’illustration, la photographie – à travers quatre maisons d’éditions, et je ne serais pas très loin sans ces personnes talentueuses qui ont osé croire dans ma folie. Et je ne serais nulle part sans mes lecteurs-trices, mes camarades, mes amis-es: je vous dois tout.
Ma démarche
Je partage la conviction d’Émil Cioran qu’un livre doit être dangereux, doit tout remettre en question. Tant qu’à cracher des centaines de milliers de mots, les écrivains-es ont une responsabilité de justifier leur existence. À quoi sert-on? Quoique j’aime la langue, en tant que géographe – et disons, en tant qu’humain – la littérature pour moi a toujours été un moyen à une fin. Et même si les livres de recette et les médiocres dominent le marché, je persiste dans l’exploration littéraire d’une nature humaine sensée. Ce qui m’intéresse, c’est l’immédiateté: la révolte, le désir, la liberté. L’empathie. L’entraide. L’immédiateté, mais dans un contexte (politique, économique) où les territoires sont marchandisés, dépossédés, et de plus en plus, résistent.
Les artistes
Dernière note sur le contenant du contenu. Le visuel n’est pas laissé au hasard et, dans la mesure où j’ai un contrôle (ce qui n’est pas toujours le cas), je prends soin de trouver quelque chose qui soit honnête par rapport au contenu même du roman, mais qui innove également et se distancie des clichés. Conséquemment, mes couvertures ont été réalisées de concert avec des artistes tels Alex Cherry, Chelsea Knight, Candace « Candylust » Barbieri, David Sénéchal, Julie Brouillard, Samantha Kayleigh Graham et Martin Côté.
Ad nauseam
Questions, commentaires, réactions? Écrivez-moi au press [at] daemonflower [dot] com.
Bibliographie
- Aporia t2. L’espace noir entre les étoiles (2025), Fides [roman]
- Aporia t1. L’Anse-aux-Malices (2024), Fides [roman]
- La lutte pour le territoire québécois (2020), Éditions XYZ [essai]
- Buzzkill (2019), Québec Amérique [roman]
- Portrait des communautés Atikamekw et du Nitaskinan (2019), pour le Conseil de la Nation Atikamekw dans le cadre du projet d’adaptation aux changements climatiques [étude]
- Portrait des groupes écologistes communautaires (2018) avec Jacinthe Leblanc et Philippe Saint-Hilaire-Gravel [étude]
- Creuse ton trou (2017), Québec Amérique [roman]
- Anarchie (avec Anna Kruzynski) dans Dominique Bourg et Alain Papaux (2015), Dictionnaire de la pensée écologique, Presses universitaires de France. pp. 27-29
- M9A. Il ne reste plus que les monstres (2015) Éditions Sabotart [roman, finaliste prix Jacques-Brossard 2016]
- Le Cirque Diabolique (2014) Bruno Massé Éditions [roman]
- L’enfer c’est les z’autres: le zombie (a)politique (2014), dans Angles morts. Différents regards sur le zombie. Montréal: Éditions XYZ, pp. 95-114
- Strigoiacă (2013) Bruno Massé Éditions [roman]
- Le jardin des rêves (2013) Guy Saint-Jean éditeur [roman]
- Anarcho-écologistes et défis de survie: réflexions (auto)critiques (2013, avec Maude Prud’homme), dans Nous sommes ingouvernables: les anarchistes au Québec aujourd’hui.
Montréal: Lux Éditeur, pp. 119-136 - Necropolis (2012) Indépendant [roman]
- The Police Pimp (2012) dans Subversions vol.2, Anarchist Writer’s Bloc, Montréal, pp. 103-114
- Valacchia (2012) Guy Saint-Jean éditeur [roman]
- Bunkertor Null: Charlie’s Last Day on the Job (2011) dans Subversions, Anarchist Writer’s Bloc, Montréal, pp. 72-79
- Écologie Radicale au Québec: pratiques et représentations des groupes écologistes radicaux au Québec, de 2001 à 2007 (2008, réédité 2011)
- La Quatrième Dimension ou les quarante impératifs de la révolution (2008) (discontinué)
- The Red Circle Hymn; Apocalyptic Noir (2009). Subversify Magazine, mis en ligne le 13 décembre 2009, 28 p.
- The Noxious and the Daemon Flower (2007, réédité en 2011) [roman]
- Introduction au phénomène d’urbanisation dans les pays en voie de développement (avec Anne Latendresse) dans Haslam, Paul et al., Introduction au développement international (2008), Ottawa : Presses de l’Université d’Ottawa, 400 p.
- Les jardins collectifs et l’agriculture urbaine, formes de renouvellement de la solidarité (2008, avec Myriam Beaudry). Collectif d’études sur les pratiques solidaires. Montréal : Cahiers de l’Alliance de recherche universités communautés en économie sociale (ARUC-ES), 64 p.
- Darkling One (2007, réécrit en 2009, réédité en 2011) [poésie]
- L’Aube Noire (2005, réédité en 2011) [roman]
Comme directeur de recherche:
- Saint-Hilaire-Gravel, Philippe. 2014 (2012). 30 ans au RQGE: une histoire dissidente de l’écologie citoyenne au Québec, de 1982 à 2012, 2e ed. Montréal: Réseau québécois des groupes écologistes. 117 p.